Entreprenariat Educatif Européen
      

L' éducation financière : pourquoi la France n'en veut pas? (André de Peretti, janv. 2013)

Pour une éducation financière : « fil rouge » d'André de Peretti lors de la réunion du 18 janvier 2013 à Paris sur l'éducation financière
 
« Je préfère participer aux projets de ceux dont le rêve s’accomplit, c’est pour cela que je suis présent ! »
 
La mise en place d'une indispensable formation, précoce et prolongée, d'une gestion responsable de l'Argent, des Finances, est d'autant plus nécessaire à établir en France que notre culture présente, outre ses qualités notoires, quelques défauts trop souvent oubliés ou minimisés.
 

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En premier lieu, notre Langue ne dispose pas, dans sa Grammaire, de « forme progressive ». Il en résulte, dans notre logique, une tendance dominante à trancher et brusquer, dans la considération des faits ou des finances, en tout ou rien, accordant une prépondérance quasi- absolue à l'abstraction : le concret, l'expérimentation, l'approche progressive, sont largement mis de côté.
 
Il s'ensuit une précipitation à conclure, sans ajustements, sans se mettre en un mouvement progressif et vigilant d'évaluation : qui assurerait une durée suffisante d'application, en responsabilisation, à la perception des conditions pratiques et à leurs évolutions possibles.
 
Au plan de l'Education Financière, il s'agira en conséquence, - et dès le plus jeune âge –, d'exercer chacun à se mettre en réflexion prolongée pour suivre les oscillations dans l'équilibre progressif des dépenses et des recettes les plus personnelles et les plus collectives : formé par l'étude d'exemples parlants et d'expérimentations personnelles ; en n’oubliant pas que l'Argent, la Monnaie, sont aussi bien en recto et verso !, concrets et abstraits.
 
En second lieu, la tendance en « tout ou rien » se conjugue à des séparations absolutisées entre des savoirs et des savoir-faire entre des références rationnelles et des hypothèses : par une fausse interprétation de la « Méthode cartésienne » oubliant que « distinguer » prépare à « unir » en fécondes interactions ; comme s'y emploie l'argent.
 
Souvenons-nous que même les Disciplines Scientifiques ont été, en France, abusivement séparées, rendant inextricables les conjugaisons de leurs connaissances et de leurs analogies méthodiques : pendant cent cinquante ans, de 1815 à 1968, il n'y eut pas d'  « Universités » en France ! Les sciences, « dures » ou « humaines », étaient radicalement séparées en des « Facultés » distantes. Il a fallu deux colloques, présidés par le grand mathématicien et ami André Lichnerowicz, à Caen en 1966, à Amiens en 1968, pour réclamer la « refondation des Universités en France. Celle-ci fut actée en octobre 1968 (après les événements que l'on sait), par un vote unanime (!) de l'Assemblée nationale, sur la proposition d'Edgar Faure.
 
Il était temps ! Depuis lors, le paradigme de « non-séparabilité » s'est en effet imposé mondialement à tous les niveaux de la Recherche et de la Techno-science, comme entre les Sciences humaines. La pensée d'une « noogenèse » anime et unit les esprits.
 
En troisième et dernier lieu, l'Education Financière est d'autant nécessaire en France, pour équilibrer son opinion, sa « Doxa », que les finances non étatiques et les activités professionnelles y sont atteintes d'un discrédit historique, qui tend à persister, et qui a été construit par Colbert pour Louis XIV : en vue d'assurer la primauté absolue du Souverain, Roi-Soleil. Il fallut alors brusquement éliminer Fouquet, figure financière s'il en fût, et interdire aux Princes toute activité professionnelle rentable qui les mettrait en concurrence avec le Pouvoir Royal, comme il en fut en Espagne, en Italie (les Médicis !), en Allemagne ; et surtout en Angleterre les Princes ont pu imposer par leurs forces financières, une Monarchie constitutionnelle « qui a fait école !».
 
Le « classicisme » français a donc imposé une norme absolutiste de « dérogeance » : tout noble français qui ferait des « affaires » deviendrait « ignoble », perdant sa noblesse. Mais cette « dérogeance » vint aussi à s'appliquer jusqu'aux artisans, indignant les Encyclopédistes ! D'Alembert, dans le Préambule de l'Encyclopédie, pouvait, en effet, s'exclamer, au milieu du XVIIIe siècle : « la société, en respectant avec justice les grands esprits qui l’éclairent, ne doit point avilir les mains qui la servent (..). C'est peut-être chez les artisans qu'il faut aller chercher les preuves les plus admirables de la sagacité de l'esprit, de sa patience et de ses ressources ».
 
Et Diderot, fils de coutelier, à la rubrique « Métier » de l'Encyclopédie, pouvait justement s'indigner : « Je ne sais pourquoi on a attaché une idée vile à ce mot ; c'est des métiers que nous tenons toutes les choses nécessaires à la vie ». Ces propos n'auraient-il plus de sens en notre Temps ? Voire…
 
Quoiqu'il en soit, les Réalités que désignent les termes de « Métier » et de « Compétences », d' « Honneur » et de « Salaire » - mais aussi ceux de « Gestion » et « Affaires », de « Profit » et d’’« Entreprise » -, ont une place importante à obtenir par et pour Education et Formation, dans notre Institution scolaire et universitaire.
 
Et cette place doit être assurée, sans tarder, au plus tôt des âges et des fonctions mêmes simples : avant que l'ignorance et des préjugés ou des réflexes anciens ne viennent coller des étiquettes de discrédit et de méfiance ou de séparation.
 
Il importe donc que les jeunes ne soient pas continuellement retardés dans le choix de leurs orientations professionnelles et de leurs responsabilités financières, garantes de leur indépendance de futur citoyen.
 
Il leur faut se préparer à « apprivoiser » le Réel et ses coûts, à la façon d'un certain « Petit Prince » …
 
André de Peretti
28 janvier 2013
 
 
Nous retiendrons aussi ces remarques qui ont ponctué les échanges :
« Toute formation doit être responsabilisante, permettre de faire des relations… »
« A 16 ans, j’ai compris que les élèves devaient être les coopérateurs des enseignants ! »
« Il s’agit de réussir pour comprendre et non l’inverse ! »
 
 


 

Dans son livre : "Virage européen ou mirage républicain? Quel avenir voulons-nous?", Nelly Guet démontre la sclérose du système éducatif français et fait des propositions européennes.